Le volume de marchandises transportées en France a représenté 325 milliards de tonnes-kilomètres, dont près de 90 % par la route1. Même si la crise sanitaire et le contexte économique ont freiné la croissance, cela représente des flux considérables de véhicules et de produits.
Quel que soit le contexte économique, les enjeux de la Supply Chain ne changent pas : il s’agit de livrer le bon produit, au bon endroit, au bon destinataire, dans les délais convenus et pour un coût raisonnable (pour l’expéditeur, les intermédiaires et le destinataire).
La chaîne logistique est aussi une chaîne de frictions
Mais, dans la réalité, les pratiques introduisent des frictions plus ou moins fortes : les flux d’informations indispensables aux différentes parties prenantes ne sont pas toujours correctement et totalement synchronisés, les processus restent encore truffés d’opérations de saisies manuelles, à partir de documents qui ne sont pas systématiquement standardisés, l’omniprésence du papier fait perdre du temps, notamment chez les transporteurs, et toute défaillance dans la chaîne de sous-traitance fragilise l’ensemble des opérations logistiques.
Ces frictions s’observent dans tous les types de logistiques, qu’il s’agisse de la logistique amont ou d’approvisionnement (pour assurer la circulation des produits entrants et sortants des sites de production), de la logistique interne (flux de fabrication à l’intérieur du lieu de production ou d’assemblage) de la logistique aval (approvisionnement des réseaux de distribution) ou de la logistique inverse, qui correspond aux flux de produits vers des sites de stockage, de retraitement ou de recyclage.
Ne pas confondre efficacité et efficience de la chaîne logistique
Certes, dans la plupart des cas, les processus logistiques fonctionnent et répondent aux enjeux. Mais pas de façon optimisée. Autrement dit, ils sont efficaces, mais pas toujours efficients. Cette distinction importante permet de comprendre la nécessité de transformer les chaînes logistiques.
Pour évaluer l’efficacité d’un processus, y compris logistique, on mesure l’écart entre les résultats obtenus et les résultats recherchés. Il est souvent faible, car les produits expédiés arrivent quasiment toujours à destination. La mesure de l’efficience, plus représentative de la qualité d’un processus logistique, concerne l’écart entre la quantité et la qualité des résultats obtenus et les ressources matérielles, humaines et financières mises en œuvre pour les obtenir. C’est là que le bât blesse !
On s’aperçoit en effet que des ressources peuvent être démesurées pour obtenir les résultats attendus, par exemple lorsque trop de collaborateurs passent trop de temps à saisir des informations, à classer des bons de commande ou de livraisons, ou à rechercher des informations utiles susceptibles de bloquer le processus logistique. Ou parce qu’il faut attendre la production d’un document papier avant de passer à l’étape suivante, par exemple une lettre de voiture (CMR : Convention de transport international de Marchandise par Route) avant d’autoriser un camion à se rendre à destination.
Les flux d’informations, des gisements potentiels de performance
Il faut donc agir pour améliorer l’efficience de la Supply Chain. Le principal levier réside dans l’optimisation des flux d’informations, prérequis à celle des flux physiques. Il s’agit d’aligner les deux, dans la mesure où tout flux physique d’accompagne nécessairement d’un flux d’informations (bons de livraison, étiquettes d’expédition, d’entrepôts, de palettes, bordereaux, convention de transport de marchandises, documents douaniers, factures…).
Pour garantir la traçabilité totale des produits, il importe donc de disposer des bons documents au bon moment, au bon endroit. Exemple de cette complexité : les CMR. Pour chaque pli, chaque colis transporté par la route, une CMR est éditée. Son cycle de vie comprend quatre étapes : la génération de la CMR, le classement à l’arrivée des camions, l’envoi des exemplaires clients avec les factures, par voie postale et l’archivage. Sachant qu’environ un milliard de CMR sont produits chaque année, cela représente pas moins de quatre milliards de manipulations de documents. Auxquelles s’ajoutent le traitement de tous les documents annexes (factures clients et d’importation, bons de préparations, nomenclature douanière, connaissements maritimes, listes de colisage, afin de vérifier la conformité de l’expédition à la commande). Le Conseil Économique et Social des Nations-Unies2 a calculé que, pour une entreprise moyenne exploitant 200 camions et émettant 200 000 CMR par an, leur dématérialisation (avec une e-CMR) ferait économiser plus de 150 000 euros par an.
Heureusement, cet alignement des flux d’informations sur les flux de marchandises est facilité par des technologies de plus en plus performantes. Et, à l’avenir, l’usage de technologies telles le Big Data et l’intelligence artificielle permettront de franchir une étape supplémentaire vers ce dont rêve tout manager logistique : disposer d’une vision de bout en bout et en temps réel, avec des capacités prédictives fiables…
1 Chiffres clés des transports 2022, Ministère de la transition écologique.https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/edition-numerique/chiffres-cles-transports-2022/6-transport-terrestre-de-marchandises
2 Note relative à la mise en œuvre du Protocole additionnel à la Convention CMR concernant la lettre de voiture électronique (Protocole e-CMR), 2021.
https://kpmg.com/xx/en/home/insights/2022/12/the-supply-chain-trends-shaking-up-2023.html